Hommage à Madeleine Riffaud
Résistante, écrivaine, et témoin inoubliable du siècle
Le 6 novembre 2024, la France a perdu l’une de ses grandes figures de la Résistance, Madeleine Riffaud. Elle avait consacré les dernières années de son existence à travailler comme scénariste BD pour restituer sur papier sa vie de résistance, celle qui fêta ses 20 ans le jour-même de la libération de Paris, fut aussi militante communiste, poétesse, journaliste et correspondante de guerre. Femme d’exception ayant vécue mille vies en une, son courage et sa foi en la liberté ont marqué l’histoire. À 100 ans, elle s’est éteinte, mais son héritage continue de résonner.
Née en 1924 à Paris, elle rejoint les rangs de la Résistance en 1943, à seulement 19 ans, et écrits ses vers à son entré dans la clandestinité :
Demain.Demain l’attente et les mots durs.
Demain le combat, le soleil et le sang.
Après-demain, nos regards triomphants.
Elle triompha, mais son regard, affecté par la torture endurée par les nazis, est atteint de cécité sur la fin de sa vie. Engagée d’abord au sein des « Francs-tireurs et partisans » puis plus tard, dans le mouvement Libération-Sud. Elle n’hésite pas à prendre des risques considérables, mettant sa vie en jeu pour saboter les forces ennemies, transmettre des informations et participer à des actions de résistance armée.
Son rôle n’a pas été seulement celui de la militante dans l’ombre des maquis, mais aussi celui de la femme déterminée à faire entendre sa voix. Après la guerre, Madeleine Riffaud devient une écrivaine prolifique, publiant plusieurs ouvrages qui mêlent mémoire, réflexion personnelle et fiction. Paul Éluard publie ses recueils de poèmes dès 1945 et son livre Le silence des armes (1946), sort alors qu’elle venait d’avoir 22 ans, un témoignage emblématique de la guerre et de l’esprit de la Résistance.
Communiste de conviction, comme tant de jeunes gens de son époque, elle a connu le communisme de Staline, le fascisme d’Hitler, la colonisation et la décolonisation, lors de ses nombreux voyages comme reporteur de guerre en Indochine et en l’Algérie Française où elle dénonce les crimes de l’armée coloniale et essuie une tentative de meurtre par bombe de l’OAS.
Mais Madeleine Riffaud ne se contenta pas d'écrire sur la guerre. Elle a aussi laissé une empreinte dans le monde de la littérature jeunesse avec des ouvrages empreints de sensibilité et de poésie. Le Chat si extraordinaire : conte du Vietnam (1991) est un magnifique récit qui mêle exotisme et émotion, invitant les jeunes lecteurs à une réflexion sur la différence, l’adversité et la quête de liberté à travers l’histoire d’un chat aux pouvoirs magiques.
De même, dans La Vie secrète du Père Noël (2006), Riffaud propose aux enfants un regard original et touchant sur la légende de Noël, en humanisant le mythe et en dévoilant les petites touches de magie qui rendent cette histoire intemporelle.
Mais son œuvre ne s’arrête pas aux livres pour enfants. De 2020 à 2024, elle a collaboré à l’écriture du scénario de la bande dessinée Madeleine, Résistante (éditions Dupuis), une série en trois volumes qui retrace son propre parcours de résistante à travers les illustrations de Dominique Bertail et les dialogues poignants de Jean-David Morvan. L’album salué par la critique et le public, est un hommage direct à son engagement et à son combat contre l'occupant nazi, permettant à la nouvelle génération de découvrir, l’histoire de cette femme hors du commun, qui a mis sa jeunesse au service de la liberté.
Au-delà de son rôle historique, Madeleine Riffaud était aussi un symbole de l’indomptable volonté humaine face à la barbarie. En 2020, à l’âge de 96 ans, elle témoignait encore dans les écoles et les médias, refusant de laisser l’oubli s’installer. Elle nous rappelait l’importance de se souvenir, non pas pour se fixer sur les douleurs du passé, mais pour transmettre les leçons du courage et de la lutte pour la justice.
À travers son exemple, Madeleine Riffaud nous rappelle que la mémoire et la transmission sont essentielles. Elle nous invite à rester vigilants face à toute forme de totalitarisme et à honorer les sacrifices de ceux et celles qui, comme elle, ont offert leur jeunesse, leur énergie et leur vie pour la liberté.