Résumé
The Smile, le super groupe formé par Thom Yorke et Jonny Greenwood de Radiohead avec le batteur de Sons of Kemet, Tom Skinner, sort un second album 'Wall of eyes' chez Xl Recordings. Cet opus est une brillante et aérienne collection de 8 titres explorant les frontières du shoegaze et de l'indie rock, accompagnés d'un orchestre à cordes et portés par la voix inimitable du leader de Radiohead.
Notre avis
Attendu avec excitation après un formidable premier album, la seconde cuvée du trio anglais est une nouvelle réussite. Nous continuons d’admirer le talent de composition et de jeu du groupe qui déploie de nouveau une palette créative variée et colorée.
Les nostalgiques de Radiohead seront ravis de trouver sur l’album un titre comme Read the Room. Une émotion particulière se dégage de Teleharmonic, chanson dominée par les percussions et les synthétiseurs et sur laquelle une audacieuse flûte trouve une place discrète mais délicate.
Enregistré au studio Abbey Road, Wall of Eyes évoque par deux fois The Beatles. Introduit par la mystérieuse guitare de Greenwood, le superbe Bending Hectic raconte une virée en voiture dans les montagnes italiennes qui s’éclaire lorsque le narrateur en vient à lâcher le volant. Le passage transitoire façon A Day in the Life qui survient aux trois quarts du morceau emmène l’auditeur dans un final explosif.
La chanson la plus mélodique de l’album, Friend of a Friend est une descendante directe du groupe de Liverpool. Au couplet minimaliste qui coule comme du miel succède un passage en rupture suivi par une transformation orchestrale psychédélique des plus réussie. A la reprise, le morceau s’enrichit de manière extrêmement subtile et se termine d’abord presque à nu avant d’accueillir sur les dernières mesures une légère touche de cordes qui emmène le titre vers la lumière du dernier accord. Si l’on peut goûter avec Friend of a Friend le grand talent d’arrangeur de Jonny Greenwood qui sait tirer partie du London Contemporary Orchestra et des effets à sa disposition, on s’en délecte tout au long du disque, sa guitare se faufilant dans tous les registres, nourrie de jazz et de prog.
Under our Pillows est un bel exemple de composition complexe en trois parties. Débutant sur un motif répétitif chaotique assez jazz-rock, elle bascule vers un passage envoutant digne du premier Genesis avant de se terminer en une forme de brume abstraite.
La diversité est de mise sur Wall of Eyes. Ainsi, la chanson qui donne son titre à l’album nous fait voyager vers une étrange contrée Brésilienne et, une nouvelle fois, le matériau de base, métronomique et évoquant l’avancée d’une pendule, est enrichi par un extraordinaire travail sonore. Les arrangements classiques des cordes se mêlent à l’abstraction des autres instruments et effets.
Plus radical encore, le déstabilisant I Quit donne l’impression de se trouver dans un espace mouvant et difforme. La voix de Thom York s’y meut pourtant avec agilité, tel un équilibriste traçant sa ligne. Le chanteur trouve par ailleurs sur l’intégralité de Wall of Eyes le terrain idéal pour déployer des registres divers, nuançant son propos, usant de son falsetto avec aisance, passant du staccato aux ondulations. Si l’on a beaucoup parlé des arrangements, le timbre particulier de York participe grandement à la couleur du disque. C’est encore le cas sur le dernier titre, You Know Me !, où la voix se pose sur un piano, et tous deux se retrouvent alors enrobés d’un étrange brouillard.