All I Want for Christmas is Music
Les albums de Noël fleurissent dans les bacs à chaque fin d’année, pour le meilleur et pour le pire. Célébrée en musique depuis des siècles, cette fête a été explorée par tous les styles. Des traditionnels sont restés et des titres sont devenus des standards. Même si la fréquentation des rues et des magasins au moment des fêtes de fin d’année peut conduire à une overdose de musique de Noël, il serait dommage de passer à côté de disques intéressants voire essentiels. Voici donc une sélection subjective à travers différents genres musicaux.
Les étoiles de Noël
Elles brillent au sommet du sapin, illuminant Noël de leur éclat.
Sufjan Stevens : Songs for Christmas (Asthmatic Kitty, 2006)
En 2006, le talentueux songwriter Sufjan Stevens sortait officiellement un coffret de 5 EP sur le thème de Noël. Mêlant traditionnel et compositions originales de style majoritairement country-folk, ces disques regorgent de magnifiques versions aux formats divers.
Sufjan Stevens : Silver & Gold (Asthmatic Kitty, 2012)
Décidément, le musicien américain aime Noël. Après un premier coffret paru quelques années plus tôt, voici que Sufjan Stevens réitère avec une deuxième boîte contenant les volumes 6 à 10 de son projet. Et nous devons reconnaître qu’il réussit une nouvelle fois l’exercice avec une collection de chansons toujours riche et encore plus variée.
Low : Christmas (Kranky, 1999)
À la tombée du XXème siècle, le grand groupe de rock du Minnesota nous offrait ce magnifique EP, pensé comme un cadeau à leur public « en dépit du côté commercial de la chose ». Cinq compositions et trois reprises émaillent le disque qui s’ouvre par un titre pop où le groupe lors d’une virée en Scandinavie s’imagine à Noël, puis se poursuit avec une belle lenteur par des versions inattendues et surprenantes de classiques. Tout cela est merveilleux.
Ella Fitzgerald : Ella Wishes You a Swinging Christmas (Verve, 1960)
Portée par les délicats arrangements de Frank DeVol, the First Lady of Song propose un album pétillant dans lequel chaque titre est un bonheur. Que ce soit dans les morceaux enjoués ou les ballades, la voix d’Ella est l’évidence même. Justesse, timbre magistral, sourire, sens du swing, tout ce qui fait de la chanteuse une interprète incontestable et qui a nous a enchanté au fil de nombreux albums est présent dans ce disque essentiel dans lequel nous retrouvons la majorité des grands standards de Noël.
Johann Sebastian Bach : Oratorio de Noël (Capriccio, 1996)
Composé en 1734, l’Oratorio de Noël est l’un des trois oratorios écrits par Bach (avec celui de Pâques et celui de l’Ascension). Constituée d’un ensemble de six cantates, l’œuvre est fondée sur l’alternance de grands chœurs et d’airs solistes pour raconter la Nativité. Tout l’art de Bach est ici au service de la fête et propose une partition solennelle, mais aussi jubilatoire à l’image de son chœur d’ouverture. Une œuvre majeure et un indispensable à écouter à la période de Noël. Nous vous proposons de la découvrir dans la version de Ralf Otto, avec l’Ensemble vocal de Francfort et le Concerto Köln, deux ensembles de premier ordre. La direction est acérée, Christoph Prégardien y campe un Évangéliste idéal. Quant à Monica Groop et Klaus Mertens, elles sont excellentes.
Marc-Antoine Charpentier : Messe de minuit (Archiv, 1997)
Le compositeur français a écrit un certain nombre de pièces sur le thème de Noël parmi lesquelles cette magnifique Messe de minuit. S’inspirant d’airs populaires, Charpentier crée une œuvre à la forme hybride où se mêlent pastorale et contrepoint savant. Cette version proposée par Marc Minkowski et ses Musiciens du Louvre est une occasion sans pareille de découvrir cette partition essentielle.
Marc-Antoine Charpentier : Pastorale de Noël (Harmonia Mundi, 2016)
Autre composition majeure de Charpentier, la Pastorale sur la Naissance de Notre Seigneur Jésus-Christ, H 483. dont l’ensemble Correspondance de Sébastien Daucé nous offre la version idéale. Avec eux l’œuvre émerveille, les chanteurs à la diction précise et aux timbres brillants l’élève et les musiciens sont au diapason.
Anne Sylvestre : Joyeux Noël ! (Anne Sylvestre, 1981)
Grande dame de la chanson, créatrice d’une œuvre magistrale à destination des enfants, Anne Sylvestre a bien sûr abordé le thème de Noël en leur offrant un disque entièrement consacré à la fête. Avec le talent qu’on lui connaît, Anne Sylvestre propose une collection de compositions originales écrites dans le style des Fabulettes. Un indispensable pour les enfants et leurs parents.
Joan Baez : Noël (Vanguard,1966)
Qui n’a pas rêvé d’entendre la magnifique voix de Joan Baez se poser sur les chants traditionnels de Noël ? En 1966, la chanteuse s’écarte du répertoire folk pour produire sa contribution au répertoire. Travaillant avec le compositeur Peter Schickele, connu pour ses parodies musicales et créateur du musicien fictionnel P. D. Q. Bach, Joan Baez foule un terrain où l’on ne l’attendait pas, et ça marche.
Connie Francis : Christmas in my Heart (MGM, 1959)
Le timbre délicieux de Connie Francis semble avoir été conçu pour interpréter le répertoire de Noël. Planant sur l’orchestre aux arrangements de circonstances écrits par le chef d’orchestre Geoff Love, Connie Francis rayonne et prend plaisir à enregistrer cette série de chansons. Conçu en deux parties, ce disque propose une première face garnie de chansons populaires, tandis que la seconde se consacre aux airs sacrés. La chanteuse excelle sur les deux registres et se place parmi les meilleures interprètes de chants de Noël.
Eric Reed : Merry Magic (MaxJazz, 2003)
Quel sens du swing ! Tous les titres de cet album font honneur au jazz. Eric Reed prouve ici une nouvelle fois son talent, s’appropriant l’univers de Noël avec originalité, sincérité, entouré de divins musiciens.
L’un des atouts de ce disque est de varier les propositions d’effectifs. Au trio rythmique s’ajoute un vibraphone pour trois titres, quelques morceaux sont chantés par trois artistes différents dont le timbre correspond à chaque fois au propos. On trouve aussi des titres en solo et en duo. Une belle réussite.
Leontyne Price : Christmas with Leontyne Price (Decca, 1961)
Enregistré avec le Philharmonique de Vienne sous la direction d’Herbert von Karajan, ce récital met à l’honneur la soprano américaine Leontyne Price, grande voix lyrique qui interprète avec brio ce répertoire.
Danny Elfman : The Nightmare Before Christmas (Walt Disney, 1993)
Le compositeur de musique de films Danny Elfman n’a jamais été aussi brillant qu’avec ce score écrit pour le film d’Henry Selick. Aussi bien disque d’Halloween que Christmas Album, The Nightmare Before Christmas saura combler nombre de mélomanes grâce à ses compositions particulièrement inspirées, orchestrées avec subtilité et des interprètes à l'avenant.
Elvis Presley : Elvis’ Christmas Album (RCA Victor, 1957)
Quand le King s’attaque au répertoire de Noël, il fait son Elvis. On peut trouver ça agaçant, ou bien irrésistible. On se range volontiers dans la seconde catégorie et, entre influences blues (Santa Claus is back in Town), jazz (Here Comes Santa Claus) et rock’n’roll entraînant (Santa Bring my Baby Back (to Me)), on découvre avec plaisir ces classiques renouvelés avec talent.
Dean Martin : A Winter Romance (Capitol, 1959)
La voix irrésistible de Dino se coule parfaitement sur ces chants de Noël et l’on ressent un plaisir communicatif à les entendre. Les arrangements pop d’Ernie Freeman et Bill Justis sont un parfait écrin pour le chanteur et l’ensemble se déguste comme un sachet de friandises. De la variété de luxe pour les fêtes.
The Beach Boys : The Beach Boys' Christmas Album (Capitol, 1964)
L’album parfait pour passer un Noël pop. Alors en pleine gloire avec leur période « surf », les Beach Boys s’attaquent au répertoire de Noël avec joie et bonne humeur. Avec des arrangements sur mesure dans lesquels Brian Wilson fait la part belle aux voix (jusque dans le final a capella), le groupe réussit un album original où se mélangent éléments du rock, du jazz et de la comédie musicale.
John Zorn : A Dreamers Christmas (Tzadik, 2011)
Musicien prolixe, John Zorn dépose son saxophone et se fait ici arrangeur et producteur afin d’apporter sa contribution au répertoire de Noël en optant pour un post-bop à la douceur de circonstance dans laquelle il glisse tout de même deux très belles compositions. Enfin un disque qui se réapproprie le répertoire de manière originale et réussie. Il se permet même d’y ajouter deux nouveaux standards de très belle facture.
Peanut Butter Wolf : Badd Santa: A Stones Throw Records Xmas (Stones Throw Records, 2007)
Le DJ américain Peanut Butter Wolf a eu la riche idée de compiler pour l’occasion des fêtes de fin d’année quelques pépites rares de la musique noire dans des styles variés. Il en résulte un disque très original, parfait antidote aux albums habituels pour celles et ceux qui n’en peuvent plus de subir les assauts des chansons insipides qui les poursuivent tous les mois de décembre.
Aldebert : Enfantillages de Noël (Warner, 2015)
Aldebert a su depuis quelques années renouveler avec bonheur le répertoire de chansons pour enfants. Il ne pouvait éviter ce passage obligé que constitue la sortie d’un disque de Noël. Mais, en évitant le piège de l’album de reprises réduit au minimum syndical, l’artiste propose bien mieux tout en restant fidèle à son univers. Parodies, compositions originales, humour, références, moments touchants, la recette Aldebert fonctionne aussi à Noël.
Les guirlandes de Noël
Elles entourent le sapin de leurs couleurs diverses, parfois scintillantes, d'autres fois étouffantes.
Ray Charles : The Spirit of Christmas (Columbia, 1985)
Ce disque est une bonne surprise. Au mitan des années 80, Ray Charles enregistre une poignée de titres qui mélangent standards et originaux dans un esprit jazz réjouissant. En compagnie de The Raelettes qui apportent leur savoir-faire sur quelques titres, le chanteur est parfait dans ce répertoire. Les dix morceaux déroulent pour la plupart une musique de qualité, notamment le sympathique Santa Claus Is Coming to Town, et dans un registre plus variété le slow réussi This Time of The Year. Le trompettiste de jazz Freddie Hubbard nous régale de son jeu de trompette sur What Child is This et Kevin Turner pose sa guitare sur le rhythm and blues Rudolph the Red-Nosed Reindeer.
Frank Sinatra : Christmas Songs by Sinatra (Columbia, 1948)
Sans compter les deux disques collectifs, 12 Songs of Christmas (1964) en compagnie de Bing Crosby et Fred Waring, ainsi que The Sinatra Family Wish You a Merry Christmas (1968), Frank Sinatra a enregistré deux albums de Noël en 1948 et 1957. Le second est le plus connu mais nous semble moins sincère que celui-ci. Le chanteur américain n’avait publié que deux albums avant cette plongée dans le répertoire de Noël et encore dans la fraîcheur de la jeunesse. La voix est présente, sensible et sans artifice. Les arrangements d’Axel Stordahl restent sobres tout en enveloppant le chant avec chaleur et volupté.
Johnny Cash : The Christmas Spirit (Columbia, 1963)
Quand on connaît la très chaleureuse voix de Johnny Cash, on n’est pas surpris de la retrouver sur un disque de Noël. Il commence d’ailleurs par faire entendre la voix parlée du chanteur, sobrement accompagnée par un piano et un chœur en sourdine. Ensuite, l’album déroule une collection de chansons tendrement country-folk qui alternent avec quelques passages parlés en musique. À noter, une version de The Little Drummer Boy assez délicate et des compositions de Cash de belle facture comme Ringing the Bells for Jim (écrite avec Jan Howard) ou We Are the Shepherds.
Compilation : Chants sacrés de Noël : du Moyen-âge à nos jours (Psalmus, 2012)
Depuis le moyen âge, la nativité du Christ a été la source d'inspiration de véritables trésors de la musique sacrée. Sur ce disque vous entendrez du chant grégorien, des Noëls traditionnels ainsi que quelques fameuses compositions de célèbres compositeurs. William Byrd, Marc-Antoine Charpentier, Jean-Sébastien Bach, Félix Mendelssohn, Jehan Alain ont en effet tous contribué à nourrir le répertoire.
Compilation : Christmas Crooners (Metro, 2003)
Si les chants de Noël sont un passage obligé des chanteurs américains, autant écouter ces grands représentants de l’art vocal que l’on appelle les Crooners. Avec ce disque, de très belles versions classiques sont proposées. Vous y croiserez Nat King Cole, Frank Sinatra, Dean Martin et Bing Crosby, soit la Dream Team d’une époque révolue.
Annie Cordy : Annie Cordy Chante Noël (Wagram, 2014)
L’actrice et chanteuse s’était prêtée au jeu du disque de Noël en 2014 pour son dernier album studio. Après une longue carrière pétillante, Annie Cordy n’a rien perdu de sa fraîcheur et s’amuse à interpréter ses chansons (reprises et créations originales) sur un rythme swing pour notre plus grand bonheur.
Compilation : Ultimate Jazz Christmas (Blue Note, 2006)
Le jazz a su s’approprier le répertoire de Noël parfois avec brio car il faut dire qu’au fond, les chansons du répertoire sont des standards comme les autres. Le label Blue Note a sorti en 2006 une compilation qui permet de découvrir différentes manières de jouer des Christmas Songs en version jazz, de l’excellent au médiocre.
Elle contient la sublime version de The Christmas Song enregistrée par le Nat King Cole Trio en 1946. Pour les amateurs de blues, Charles Brown interprète avec sa douce voix un Merry Christmas, Baby sensuel, accompagné par de talentueux musiciens. Les chanteuses sont bien sûr au rendez-vous. Diane Reeves livre un Jingle Bells en version mi slow-blues, mi swing. Norah Jones propose un Peace au piano-chant certes dépouillé mais trop artificiel (une impression que l’on retrouve encore plus chez Lou Rawls et son dispensable Have Yourself A Merry Little Christmas). C’est surtout Nancy Wilson qui nous touche avec sa douce manière d’interpréter That's What I Want For Christmas sur un luxueux arrangement.
Duke Pearson a l’honneur de présenter deux titres issu de son médiocre Merry Ole Soul et, que ce soit avec Sleigh Ride ou avec Little Drummer Boys, on n’est pas convaincu. On le préfèrera en compositeur et arrangeur de Cristo Redentor, dont l’interprétation de Donald Byrd est un bel exemple d’introspection habitée, où la simplicité est l’évidence même. La talentueuse pianiste Eliane Elias nous propose quant à elle un I've Got My Love To Keep Me Warm plein de swing tandis que le saxophoniste Booker Ervin se révèle bien inspiré pour son White Christmas qui contient en prime un très bon solo de piano de John Hicks. La compilation se referme sur l’un de ses meilleurs titres : A Child is Born, magnifique composition de Thad Jones, ici interprétée par son créateur en compagnie de son acolyte Mel Lewis.
Molly Burch : The Molly Burch Christmas Album (Captured Tracks, 2019)
C’était la surprise de l’année 2019, l’artiste de rock indépendant Molly Burch sortait un Christmas Album hors des sentiers battus. La chanteuse d’Austin se permet des reprises surprenantes et réussies comme Snowqueen of Texas (The Mamas and the Papas), Last Christmas (Wham!), Happy New Year (ABBA), ou encore Have Yourself a Merry Little Christmas (avec une chorale d’enfants). Mais cet album de Noël propose également de beaux moments épurés (The Secret of Christmas, Auld Lang Syne), country-folk (Hard Candy Christmas, New Year Love), pop (Holiday Dreaming), glamour (I'll Be Home for Christmas). Voilà une belle manière de renouveler le répertoire.
Nat King Cole : Christmas Album (Capitol, 1960)
Comme sa consœur Ella Fitzgerald, Nat King Cole avait enregistré son album de Noël dans le courant de l’été 1960. Mais il avait avant cela gravé quelques singles qui apparaissent également dans le présent disque. Ne serait-ce que pour l’absolue version de The Christmas Song qu’il contient, précipitez-vous sur ce disque. Les titres de l’album original The Magic of Christmas, arrangés dans une veine Hollywoodienne parfois sirupeuse ou grandiloquente par le chef d’orchestre Ralph Carmichael, savent mettre en avant la voix veloutée de Cole mais restent décoratives.
Mariah Carey : Merry Christmas (Columbia, 1994)
Ce Christmas Album, sorti en 1994, est devenu un classique. Le disque de la célèbre interprète n’a pas vieilli : chanteuse investie, arrangements soignés et production luxueuse, les amateurs seront comblés.
Superproduction dont seuls les Américains ont le secret, Merry Christmas transcende le côté commercial que l’on pourrait lui reprocher, se révélant à la hauteur du projet et porté par une Mariah Carey convaincue.
Ce disque contient bien entendu le tube All I want for Christmas is You, mais il offre aussi des moments remarquables. En particulier avec Santa Claus is Comin’ to Town. Les amateurs de chansons d’amour fondront avec l’inédit Miss You Most (At Christmas Time). Les racines de la chanteuse s’invitent dans cet album qui s’ouvre et se clôt en mode gospel. Silent Night prend la forme d’une ballade fervente tandis que l’addictif Jesus Oh What a Wonderful Child nous embarque avec son final explosif.
Corou de Berra : Caléna : Noël provençaux et niçois (Buda musique, 2001)
L’ensemble polyphonique des Alpes du Sud nous fait découvrir avec ce disque le répertoire des Noëls (Caléna) provençaux et niçois. La qualité de cet ensemble permet de découvrir ce répertoire méconnu de la meilleure des manières. Au milieu de l’album, vous pourrez redécouvrir le célèbre Petit papa Noël dans une étonnante version.
Florent Marchet : Noël’s Songs (Nodiva Records, 2011)
Si vous cherchez un disque pour changer des albums traditionnels de Noël, Noël’s Songs est fait pour vous. L’auteur compositeur et interprète Florent Marchet, qui s’est illustré avec des albums délicats de chanson française, se lance ici dans une collection de titres qui mêlent reprises attendues (Douce nuit, Petit papa Noël) ou surprenantes (Joyeux Noël de Barbara, Noël à la maison de Murat). Dans le fond et dans la forme, un renouveau bienvenu.
Michael Bublé : Christmas (2011)
Sans être un grand disque, Christmas est une honnête collection de chansons de fin d’année interprétées avec sincérité et arrangées avec soin. On sent que le chanteur prend plaisir à se prêter au jeu (Holly Jolly Christmas), voire s’amuse carrément en compagnie des Puppini Sisters sur un Jingle Bells détonant.
Le charme opère dès l’initial It’s Beginning to Look Like Christmas où le timbre chaleureux du chanteur glisse sur les arrangements de circonstance de David Foster. Pat Williams crée quant à lui un tapis au swing brillant façon âge d’or et permet à Michael Bublé de s’y promener nonchalamment avec aisance. Sur Santa Baby, l’interprète prend un petit air de Gene Kelly qui lui va très bien.
Certains titres sont un peu lisses et formatés (White Christmas avec Shania Twain, Have Yourself a Merry Little Christmas, Silent Night), et d’autres sont détestables (All I Want for Christmas is You, Christmas (Baby Please Come Home). Blue Christmas est parti de la bonne idée d’en faire un titre de fanfare New Orleans mais souffre d’un arrangement trop chargé. Quant à Mis Deseos/Feliz Navidad, en duo avec la chanteuse mexicaine Thalía, il a l’avantage de sortir le répertoire de son univers habituel mais sonne comme un titre plus commercial qu’artistique.
Christmas est un album de variété assumée où l’on peut trouver de très bonnes choses, mais aussi des classiques revisités sans surprise interprétés par un chanteur à la voix idéale pour le style et qui saura faire connaître certains titres à ses fans, le parfait exemple se trouvant sur I'll Be Home for Christmas. Mais hélas, il renferme aussi des pistes que l’on aimerait oublier, à l’image de cet Ave Maria de Schubert irrévérencieux.
She & Him : A Very She & Him Christmas (Columbia, 2011)
Le duo propose un disque dépouillé de reprises sur le thème de Noël. Parfois folk, parfois rockabilly ou encore pop, le groupe joue à la manière vintage en s’amusant à endosser sans prétention les habits de leurs illustres prédécesseurs. Parfois ça fait mouche (Have Yourself a Merry Little Christmas, Baby, It's Cold Outside), parfois c’est surjoué (Blue Christmas, The Christmas Song). La production du disque amène à la fois un côté chaleureux et artificiel (abus de l’effet reverb). En somme, un disque original sans être formidable. Le groupe remettra le couvert en 2016 avec Christmas Party, un disque qui n’ajoute pas grand-chose à l’édifice.
Chilly Gonzales : A Very Chilly Christmas (2020)
Le pianiste canadien a voulu faire un disque de Noël mélancolique. Pour lui, la célèbre fête de fin d’année est « une période typique de bonheur superficiel, mais aussi un moment de réflexion et de deuil des événements tristes qui se déroulent tout au long de l’année ». Et, en effet A Very Chilly Christmas n’est pas vraiment un disque à diffuser un soir de réveillon en famille.
Interprétés pour la plupart en solo, les titres tirent souvent vers le style easy listening d'un piano bar quelconque (White Christmas, Good King Wenceslas, God Rest Ye Merry Gentlemen, Maria Durch Ein Dornwald, O Come, All Ye Faithfull). De plus, les quelques interventions d’instruments supplémentaires ajoutent à ce sentiment de musique d’ascenseur (We Three Kings, Silver Bells). Mais, quelques fois, le musicien est inspiré (le mélancolique Silent Night, O Tannenbaum).
Deux reprises de tubes internationaux sont ici revisitées. Ainsi le Last Christmas de Wham, en guise d’originalité se voit doté d’une piteuse orchestration. On lui préférera All I Want for Christmas is You, joué en solo et qui nous permet d'apprécier le carton de Mariah Carey dans son plus simple appareil, révélant la qualité de sa composition, ici ornementée avec goût.
Les moments vraiment appréciables se trouvent quand le pianiste s’entoure de deux chanteurs invités. Feist, tout d’abord, qui s’investit sur la seule composition de Gonzales, The Banister Bough, belle chanson poétique dont la musique lorgne sur le standard The Christmas Song.
Ensuite c’est Jarvis Cocker qui est chargé de rendre hommage à David Berman, regretté leader de Silver Jews, auteur, compositeur et interprète du superbe Snow Is Falling in Manhattan, écrit pour l’unique et excellent album de Purple Mountains. Le résultat n’atteint pas l’émotion de l’original mais cette formule au piano portant la chaleur de la voix de Jarvis Cocker accompagnée de celle angélique de Feist sur le refrain est bien sympathique.
Finalement, A Very Chilly Christmas, qui propose un Noël en mode mineur, est un disque plus anecdotique qu’émouvant mais comporte quelques titres appréciables.
Pour un avis plus positif sur ce disque, retrouvez le coup de cœur de Leslie.
Les boules de Noël
Elle brillent de loin, mais peuvent se révéler de pacotilles.
Boney M. : Christmas With Boney M. (Sony, 2007)
Ce disque est-il une blague ? On peine à reconnaitre le groupe de disco dans cette succession de chansons insipides dont aucune n’invite à danser. Instruments improbables, interprétation sans conviction, le répertoire de Noël est ici malmené de bout en bout. Il faut un, être un inconditionnel de Boney M., deux, être sourd ou bien trois, entreprendre de faire une critique honnête de ce disque pour réussir à l’écouter dans son entier. Dans ce florilège, la palme revient sans doute à I’ll Be Home for Christmas. Quand on sait combien la chanson peut être poignante, on est atterré à l’écoute de cette version « revisitée » qui, heureusement, clôt l’album.
Du reggae de seconde zone de White Christmas et Jingle Bells au rap de troisième division de Mary's Boy Child - Oh My Lord, en passant par la flûte Melody Pops de Feliz Navidad, on a du mal à comprendre le succès reçu à l’époque.
Bob Dylan : Christmas in the Heart (Columbia, 2009)
Pour se prêter au jeu du Christmas Album, Bob Dylan aura attendu 2009. Il n’en avait peut-être pas très envie au fond, car quand on entend le résultat, on se dit que la chose a été prise par-dessous la jambe. La voix est caricaturale (aurait-il bu avant les sessions pour oublier ce qu’il y chante ?). Ecoutez donc ce Hark the Herald Angels Sing sur lequel sa voix contraste avec celles du trop innocent chœur féminin. Son I'll Be Home for Christmas semble interprété depuis le comptoir et l’on se demande s’il sera vraiment présent à Noël auprès des siens. The Little Drummer Boy réussit l’exploit de devenir soporifique. Un peu de joie arrive enfin avec le Must be Santa des tavernes où la troupe a l’air de bien s’amuser. Mais c’est bien peu pour un disque de quinze titres.
Au final, ce Christmas album semble avoir été fait par quelqu’un qui déteste Noël. Quitte à gâcher la fête, préférons-lui donc la compilation Badd Santa de Peanut Butter Wolf (voir plus haut).
Gregory Porter : Christmas Wish (Decca, 2023)
Malgré toute l’estime que l’on porte à Gregory Porter, belle voix du jazz et de la soul, un seul titre est à sauver de son album de Noël : Everything’s Not Lost. C’est peut-être parce qu’il appartient au répertoire soul qu’il se coule bien dans la production bien lisse de ce disque raté.
Tout a déjà été fait en mieux et ce Christmas Album prouve qu’il ne suffit pas d’emmener un bon chanteur en studio pour qu’il en ressorte une œuvre de qualité. Ce coup commercial n’ajoute rien de neuf à l’immense pile de disques qui s’entasse sous le sapin depuis le siècle dernier. Car on a beau essayer d’y croire en allant jusqu’au bout des douze titres, jamais nous ne parvenons à être convaincu par l’habillage formaté de ces chansons. On n’est d’ailleurs pas certain que Gregory Porter lui-même y croit. Si les créateurs de ce projets ont voulu faire du joli, ils n’ont pas réussi à y faire souffler le moindre esprit de jazz.
Si vous en voulez encore...
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